San­der Loones, eu­ro­dé­puté et vice-pré­sident de la N-VA "Le na­tio­na­lisme, c'est quelque chose de bien"

Door Sander Loones op 2 juli 2016, over deze onderwerpen: Brexit, Europees beleid, Brits referendum

Vice-pré­sident de la N-VA, l'eu­ro­dé­puté San­der Loones est très proche des conser­va­teurs bri­tan­niques. Il re­vient sur les consé­quences du Brexit. Il plaide pour que les Ecos­sais aient le droit de re­joindre l'Eu­rope, se ré­jouit de cet en­goue­ment pour le na­tio­na­lisme. Avec dans le vi­seur la Ca­ta­logne et puis la Flandre.

Est-ce que le Brexit est une ca­tas­trophe ?

Bon, les Bri­tan­niques de­vaient dé­ci­der, ils ont dé­cidé. Le vote a été clair et il doit être res­pecté. Main­te­nant, est-ce un drame? Si on re­garde les chiffres et l'im­pact éco­no­mique, ef­fec­ti­ve­ment, ça va être dif­fi­cile. Qui va perdre avec ce Brexit d'un point de vue éco­no­mique? D'abord, l'Ir­lande, en­suite, la Flandre. La Flandre est la deuxième ré­gion la plus tou­chée de toute l'Union eu­ro­péenne par le Brexit. Les liens éco­no­miques entre la Flandre et l'An­gle­terre sont énormes et pèsent des mil­liers d'em­plois. Voilà pour­quoi le mi­nistre-pré­sident fla­mand a pris po­si­tion pour un "soft Brexit".

Qu'est-ce que c'est?

Cela im­plique un débat adulte entre le conti­nent eu­ro­péen et l'An­gle­terre, com­ment trou­ver un nou­veau vivre-en­semble per­met­tant de sau­ve­gar­der tous ces em­plois. Il faut être pru­dent. Ce Brexit est donc une mau­vaise chose d'un point de vue éco­no­mique mais aussi du point de vue des idées.

pli­quez.

Si on veut une Eu­rope fé­dé­ra­liste, on sou­tient An­gela Mer­kel. C'est son pro­jet. Si on pré­fère une Eu­rope in­ter­ven­tion­niste sur le plan so­cio-éco­no­mique, avec des taxes eu­ro­péennes et plus de dettes, alors on doit prendre parti pour Fran­çois Hol­lande et les so­cia­listes. Mais si on veut une Eu­rope avec un es­prit ou­vert sur le monde, sans pro­tec­tion­nisme et avec du libre-échange, c'était le pro­jet des Bri­tan­niques et aussi le nôtre. Cela nous tient à coeur. Mais soyons hon­nêtes: avec le dé­part des Bri­tan­niques, cela va être plus com­pli­qué. Dans notre groupe po­li­tique, on per­dra à terme 21 dé­pu­tés bri­tan­niques sur 74 dé­pu­tés.

Vos idées sortent donc af­fai­blies.

Non, on doit voir com­ment s'or­ga­ni­ser; il est plus fa­cile de se dé­fendre quand on a un grand Etat membre der­rière soi. Mais quand je vois com­ment notre groupe ne cesse de gran­dir... on a des dé­pu­tés de 18 pays. Le groupe des conser­va­teurs et des ré­for­mistes eu­ro­péens a du sou­tien de par­tout.

Sur­tout d'Eu­rope de l'Est...

Pas seule­ment. Ceci dit, je pense qu'on doit construire da­van­tage de ponts avec les pays nord-eu­ro­péens : Pays-Bas, Da­ne­mark, Fin­lande ou une ré­gion comme la Ba­vière. Ils ont les mêmes idées so­cio-éco­no­miques, proches des nôtres. On le voit chez des par­tis comme le VVD ou même le CDA aux Pays-Bas. D'un autre côté, on est aussi in­té­res­sés par des par­tis qui ont une his­toire et des re­ven­di­ca­tions com­mu­nau­taires comme la nôtre - les Basques, les Ca­ta­lans, les Ecos­sais.

Vous plai­dez pour un soft Brexit, mais plu­sieurs res­pon­sables eu­ro­péens ont dit que ça de­vait aller vite...

Mais dans tous les par­tis po­li­tiques en An­gle­terre, le lea­der­ship n'existe plus. Ce se­rait donc nor­mal d'at­tendre jusque début sep­tembre, quand les conser­va­teurs au­ront un nou­veau pré­sident et qu'un nou­veau Pre­mier mi­nistre sera en place. Au­jour­d'hui, on ne sait même pas avec qui né­go­cier.

La N-VA a des liens très étroits avec les conser­va­teurs bri­tan­niques, vous aviez no­tam­ment rendu vi­site à David Ca­me­ron. C'est Boris John­son et le "Leave" qui ont gagné. Vous aviez misé sur le mau­vais che­val...

Non! On n'a pas bâti un lien avec David Ca­me­ron mais avec tout le parti conser­va­teur. On avait de bons contacts avec des membres des deux camps. On a un lien avec les idées des conser­va­teurs bri­tan­niques. Il y a 270 firmes bri­tan­niques en Flandre et 83% du com­merce belge avec l'An­gle­terre, c'est la Flandre. On a in­té­rêt à ce que ça ne change pas. Donc, le lien avec les conser­va­teurs bri­tan­niques va res­ter ter­ri­ble­ment im­por­tant même si l'An­gle­terre sort de l'Union eu­ro­péenne. L'An­gle­terre, c'est une île, ce n'est pas un ba­teau qui va na­vi­guer vers les Etats-Unis ou l'Aus­tra­lie: elle ne va pas bou­ger, il est donc es­sen­tiel et in­dis­pen­sable de main­te­nir les contacts, entre autres dans l'in­té­rêt éco­no­mique.

Mais on va re­dis­cu­ter des bar­rières ta­ri­faires, droits de douane, etc. Donc, for­cé­ment, il va y avoir des obs­tacles au com­merce et à l'éco­no­mie.

On doit dis­cu­ter de tout cela. Re­gar­dez: la Nor­vège et la Suisse ont des sta­tuts spé­ci­fiques, pour­quoi ne pas s'en ins­pi­rer pour l'An­gle­terre? Mais on va né­go­cier en tant que par­te­naires égaux: on ne doit pas vou­loir prendre une re­vanche sur l'An­gle­terre. Ce pays sera à la table des dis­cus­sions, il ne doit pas être au menu des dis­cus­sions.

Pour­quoi ont-ils dit non à l'Eu­rope, fi­na­le­ment?

Ce qui a pesé lourd dans la ba­lance, c'est toute la mau­vaise per­cep­tion au­tour de la libre cir­cu­la­tion des Eu­ro­péens dans l'Union. Com­plété avec l'at­mo­sphère né­ga­tive de la crise d'asile et de la crise de sé­cu­rité, même si les An­glais ne font pas par­tie de la zone Schen­gen. Je pense que, sur­tout là, des ré­formes doivent avoir lieu: les pro­blèmes ne dis­pa­raissent pas avec la dis­pa­ri­tion des An­glais de l'Eu­rope. Il faut s'as­su­rer que per­sonne ne pro­fite in­dû­ment des sys­tèmes de sé­cu­rité so­ciale. Si je re­garde en ar­rière, à par­tir de 2004, on a élargi l'Eu­rope vers l'Est. Nous avons tous mis des clauses tran­si­toires pour que les Po­lo­nais, les Rou­mains,... ne puissent pas venir tout de suite dans nos pays. Les seuls qui ne l'ont pas fait, ce sont les An­glais, di­ri­gés à l'époque par le New La­bour de Tony Blair. Consé­quence: 2 mil­lions de nou­veaux Eu­ro­péens sont ar­ri­vés en An­gle­terre en six ans; ça a changé la so­ciété bri­tan­nique, mais aussi la per­cep­tion de la réa­lité. La convic­tion en An­gle­terre est que ces gens pro­fitent du sys­tème sans y contri­buer. Ça, c'est un des fon­de­ments de l'hos­ti­lité des An­glais vis-à-vis de l'Eu­rope. Tout cela, c'est aussi en par­tie va­lable chez nous, et on doit avoir ce débat sur la mi­gra­tion. La li­berté de cir­cu­ler, ce n'est pas le droit d'al­ler vivre dans un autre pays Eu­ro­péen pour y ré­cla­mer des droits so­ciaux.

Pour­tant, l'éco­no­mie bri­tan­nique se porte plu­tôt bien; ces mi­grants tra­vaillent, ça tourne.

Oui, dans le cas an­glais, il s'agit aussi par­tiel­le­ment d'une mau­vaise per­cep­tion. Mais même une per­cep­tion de­vient réa­lité quand les dé­bats s'in­ten­si­fient. En tout état de cause, ça a été pro­vo­qué par une po­li­tique so­cia­liste bri­tan­nique et une mau­vaise ges­tion des en­jeux; c'est le cas aussi ici en Bel­gique, la po­li­tique mi­gra­toire du PS. Une po­li­tique avec la­quelle on a voulu ache­ter des votes, juste en don­nant l'ac­cès à son ter­ri­toire.

Là, c'est un peu court quand même. En Bel­gique, on a tou­jours sou­tenu l'Eu­rope.

Il faut être beau­coup plus nuancé que cela. Là aussi les choses évo­luent for­te­ment. Les gens sont fâ­chés sur l'Eu­rope, chaque fois avec les mêmes griefs : mi­gra­tion et sé­cu­rité qui ne sont pas gé­rées. On doit re­fixer les règles du jeu: les gens qui viennent ici doivent d'abord contri­buer à notre sys­tème avant d'en bé­né­fi­cier.

L'Ecosse a voté en fa­veur de l'Eu­rope et pour­rait tenir un nou­veau ré­fé­ren­dum qui se­rait, selon les termes de votre pré­sident Bart De Wever, un "pré­cé­dent in­té­res­sant". Qu'est-ce que ça veut dire?

Deux choses. Primo, je de­mande d'être consé­quent. Tout le monde pré­tend vou­loir res­pec­ter la vo­lonté des Ecos­sais de res­ter membre de l'Union. Mais quand on a dû voter au par­le­ment ce mardi pour que les Ecos­sais puissent re­joindre l'Union eu­ro­péenne, la N-VA et les verts ont voté pour, mais le PS et le MR ont voté contre - sauf Fré­dé­rique Ries. Les chré­tiens ont aussi voté contre. Deu­zio: Guy Ve­rhof­stadt, qui donne des le­çons de­puis des an­nées en di­sant que le na­tio­na­lisme mène aux chambres à gaz, c'est lui qui re­çoit main­te­nant la Pre­mière mi­nistre écos­saise. Il est sans doute forcé de re­con­naître que notre na­tio­na­lisme c'est quelque chose de bien, le droit des peuples à dis­po­ser d'eux-mêmes et à se dé­ter­mi.

Il n'a pas dit cela comme ça!

Si on re­çoit Ni­cola Stur­geon et qu'on dit que les Ecos­sais doivent avoir leur in­dé­pen­dance et leur place en Eu­rope, alors on sou­tient le na­tio­na­lisme et le ré­gio­na­lisme. 1+1, ça fait 2. Si on dit que les Ecos­sais peuvent quit­ter le Royaume-Uni, alors, c'est du na­tio­na­lisme. On doit être consé­quent. Je suis content que Guy Ve­rhof­stadt change d'opi­nion. Ne lais­sons pas tom­ber les Ecos­sais, car eux n'ont ja­mais laissé tom­ber l'Eu­rope!

Sou­te­nir les Ecos­sais, c'est ou­vrir la porte d'en­trée à la Ca­ta­logne ou à la Flandre de tenir des ré­fé­ren­dums pour quit­ter leurs pays res­pec­tifs.

Ce n'est pas un ha­sard si Ma­drid a di­rec­te­ment dit "non" à l'Ecosse. Ils pensent déjà à la Ca­ta­logne. Nous, ici au ni­veau fé­dé­ral Belge, on s'est mis d'ac­cord sur une pause com­mu­nau­taire. La N-VA res­pecte sa pa­role et on conti­nuera de tra­vailler bien en­semble sous l'angle so­cio-éco­no­mique. Mais en Ca­ta­logne, c'est le contraire. Ils ont un gou­ver­ne­ment avec un dead­line dans en­vi­ron un an et là ils vou­dront être in­dé­pen­dant. C'est une évo­lu­tion très in­té­res­sante en Eu­rope.

On fait com­ment pour re­lan­cer l'Eu­rope?

Moi je suis un vrai Eu­ro­péen, je suis convaincu, n'ayons pas peur de la dé­mo­cra­tie eu­ro­péenne. Mais pour pou­voir en­thou­sias­mer les gens pour l'Eu­rope, on doit ré­for­mer. Pre­mier chan­ge­ment: on a be­soin d'un nou­veau lea­der­ship et on doit res­pon­sa­bi­li­ser tout le monde. Cela im­plique un nou­veau mo­dèle de prise de dé­ci­sion avec tous les autres membres, y com­pris les pays de l'Est. Mais pour les convaincre, il faut dé­fi­nir l'UE et sur­tout dé­fi­nir nos fron­tières. Où sont-elles? On doit pou­voir dire, par exemple, très clai­re­ment: la Tur­quie ne sera ja­mais membre de l'Union eu­ro­péenne. Ja­mais. Et on doit aussi dé­fi­nir les li­mites à la mi­gra­tion. Il doit y avoir un nombre maxi­mal de gens qu'on puisse ac­cueillir chez nous.

Donc, on ne doit pas tra­vailler avec des pe­tits groupes de pays pour re­lan­cer l'Eu­rope?

Bof. Tra­vailler avec qui? Si c'est pour uni­que­ment tra­vailler avec les six pays fon­da­teurs, ça ne m'in­té­resse pas. Avec l'Ita­lie et la France, ce sont les deux pays qui n'ont pas leur éco­no­mie sous contrôle. Si on peut avoir un lien entre l'Al­le­magne, la Bel­gique, les Pays-Bas et le Da­ne­mark, ça c'est quelque chose d'autre, ça de­vient in­té­res­sant. Si c'est pour suivre la France qui ne res­pecte au­cune règle du pacte eu­ro­péen de sta­bi­lité, qui ne met pas ses comptes en ordre, c'est non.

Vous par­lez de va­leur ajou­tée pour l'Eu­rope et pour les Ré­gions. Et pour la Bel­gique, il y en a une?

Cer­tai­ne­ment: la dé­fense, par exemple, nous sommes très clairs, là-des­sus. On doit avan­cer vers une dé­fense eu­ro­péenne, liée à l'Otan. Mais là aussi, soyons hon­nêtes, sans les Bri­tan­niques, on perd beau­coup. Leur dé­part va nous af­fai­blir, entre autres vis-vis de la Rus­sie de Pou­tine.

Interview met Sander Loones in L'Echo op 2 juli 2016

 

 

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